Portrait d'un chef de projet, Emmanuel Régis

Creajol : Qui es-tu ?

Une personne avec un parcours bizarre qui a été développeur dans l'industrie dite classique puis dans le jeu vidéo à partir de 1993. Ensuite, j'ai pris conscience que la gestion des équipes était stratégique pour la bonne santé des projets. Ce moment de ma vie a été une révélation et je me suis nourri de management, project management, etc. Je suis donc devenu project manager avec passion pour mettre en place de saines relations humaines et d'organisation, de pilotage des projets.

Creajol : En quoi consiste ton métier ?

Depuis 2002 je vole de mes propres ailes. C'est la prolongation logique de mon métier de project manager, de chef de projets. Je formaconseille, je fabrique, crée des outils en project management et en organisation pour l'industrie dite classique et celle des loisirs numériques. Mon objectif est d'aider les personnes à être plus à l'aise, plus autonome dans leur quotidien de travail en optimisant leur organisation, leur management. Aussi, j'enseigne des cours qui immergent les étudiants dans le secteur des loisirs numériques (jeu vidéo, jouet, robotique) grâce des archives, films, machines, interviews (je fais comme toi !), etc. Désolé je suis un passionné bavard, oups !

Creajol : Est-ce qu'il s'agit d'une passion ?

Je pense que tu as compris que oui. ;o) Sachant que cette passion est liée à un souci pédagogique important. Comme un bon game design qui permet d'appréhender un jeu rapidement, de comprendre sans effort son gameplay.

Creajol : Professionnellement, quel est ton plus grand souhait ?

Continuer à travailler sur des projets grâce à l'association de mon expérience d'informaticien, de project manager, de pédago et de créateur d'outils de formation ou de d'organisation sur mesure.

Creajol : Que dirais-tu aux gens qui rêvent de travailler dans le milieu ?

Prenez conscience que le Père Noël a de grandes dents. Mais une fois cette prise de conscience, ne vous démontez pas: formez-vous avant tout, comprenez ce secteur qui est particulier par ses codes, créez-vous un carnet d'adresses de toute urgence, soyez créatif pour proposer votre savoir-faire, travaillez beaucoup car le milieu est très exigeant et ne vous découragez pas.

Creajol : Comment es-tu rentré dans l'industrie du jeu vidéo ?

Oulala c'est une longue histoire ! Je vais faire au plus court. Suite à un échec scolaire dans les années 80 j'ai fait un CAP D'Ajusteur (et oui ! de la mécanique) et c'était le début de l'informatique familiale avec les ZX81 et autres bestioles du genre. Je suis donc tombé comme Obélix dans sa potion magique quand il était petit. Ma potion était la programmation. :o) Je me suis retrouvé à donner des cours à des profs au milieu de l'atelier de mécanique et à monter des clubs d'informatique avec plusieurs élèves qui avaient attrapés le virus du langage Basic et de l'assembleur. A ce moment j'ai commencé à créer des jeux vidéos pour m'amuser et aider des élèves en difficulté scolaire.

Après la reprise du cycle long scolaire et mon BTS en Informatique Industrielle en poche, j'ai travaillé pour des industriels pour programmer des applications de pesage, de supervision, etc. En 1993, la crise frappe et l'entreprise qui m'employait se trouve en difficulté. Un ami (qui sera se reconnaitre et dont je suis très reconnaissant aujourd'hui) me propose d'aller au cinéma et en discutant il m'explique qu'il est depuis 6 mois dans une entreprise de jeu vidéo en pleine croissance. Il cherchait des informaticiens débrouillards pour des machines toutes nouvelles qui arrivaient sur le marché, comme la SNES de Nintendo.

Il n'y avait pas d'écoles de jeu vidéo et la recherche de profils liés au jeu était très difficile. Mon profil convenait tout a fait avec les expériences réalisées à partir du CAP. Je suis donc rentré dans le jeu vidéo grâce à une sortie cinéma. ;o) Je voudrais vous faire remarquer que les consoles étaient loin d'avoir conquis le marché. Il était détenu à cette époque par le PC essentiellement ! Puis en moins de cinq ans tout s'est retourné. Les marchés technologiques, comme le jeu vidéo, sont relativement imprévisibles.

Dans ce nouvel emploi j'ai travaillé sur différentes consoles, téléphonie mobile et télévision interactive. J'ai programmé puis j'ai géré des équipes en mode projet. Je souligne que le destin m'a ouvert des portes et ceci grâce au travail que j'avais semé avec passion. Si vous voulez donc travailler dans ce secteur, n'hésitez pas à créer des maquettes, des dossiers sur des idées ou tout autre élément qui pourront vous aider. Semez ! Semez !

Creajol : Un avis sur l'avenir du jeu vidéo ?

Le secteur du jeu vidéo était affaire de spécialistes il y a une dizaine d'années. Aujourd'hui presque n'importe qui peut se lancer avec plus ou moins de succès. La concurrence est donc rude. Naturellement, les personnes devront aller chercher du travail sur d'autres secteurs des loisirs numériques : édition, web, jouet, robotique de loisir, tourisme (si! si!). Puis, aujourd'hui le secteur du jeu vidéo est pris très au sérieux par l'industrie dite classique (si, si bis) car ses compétences pointues et sa créativité associées sont recherchées. Le secteur du jeu video créé aussi des besoins comme le serious gaming. En résumé, le secteur du jeu vidéo s'ouvre à d'autres domaines tout aussi passionnants ! Je conseille fortement les étudiants issus des écoles de jeu vidéo de s'ouvrir aussi.

Creajol : Un cadre de travail idéal, c'est quoi ?

C'est très simple, ce qui ne veut pas dire simpliste. ;o) Il faut des outils qui sont le prolongement de la main du travailleur. Cela va aller des locaux, de leur disposition, d'un ordinateur performant, d'un crayon qui écrit et j'en passe ! Après il faut une organisation de travail cohérente, comprise pour et par les femmes et les hommes qui travaillent ensemble. Je pense que si une personne est bien dans son travail, si elle s'éclate, si elle s'y retrouve en apport personnel et financièrement, alors son travail sera de qualité optimale. De plus, elle transférera cette qualité d'être dans sa vie personnelle. Oui, tout cela peut sembler utopique mais c'est possible d'y arriver. Une des clés majeure de la bonne santé d'un projet passe par les bonnes relations humaines. C'est évident mais elles sont malheureusement très souvent négligées... Comme le secteur du jeu vidéo est très concurrentiel et avec une culture de la non-organisation, il y a souvent des abus... Heureusement il y a des contres exemples. :o)

Creajol : Que transmets-tu lorsque tu crées ?

De la facilitation dans le travail quotidien. L'idée est de gagner du temps pour supprimer du coût caché. Ce temps gagné peut aussi être du temps gagné sur des actions pénibles, peu intéressantes. Autant aller au plus vite pour passer à des actions plus motivantes ! Comme je l'ai déjà dit, le secteur est très concurrentiel, ainsi le coût pour une entreprise de développement est plutôt au plus bas qu'au plus haut... Supprimer du coût est donc important.

Creajol : Autre chose ?

Il y a tant à dire sur les loisirs numériques ! Je pense à un secteur qui me passionne depuis gamin : La robotique de loisir et des services. Secteur en pleine croissance depuis 2005. Un secteur à ne pas négliger car la France est en pointe et elle a tout a gagner dans l'histoire. :o) Ce secteur innovant emploie de nombreuses personnes venant du jeu vidéo. Il y a tout à créer, à découvrir comme à la naissance du secteur du jeu vidéo il y a plus de trente ans déjà.