Portrait d'un responsable localisation, Julien Buseyne

Julien Buseyne, responsable de la localisation des jeux, a bien voulu répondre à nos questions sur son métier. Bienvenue dans la Série des Portraits de Creajol !

" Ça ne se limite pas à de la traduction, mais aussi à de l'adaptation à la culture visée. [...] En définitive, ce que je transmets c'est ma conviction que les petits détails font les grandes choses et ça se manifeste par un regain de qualité pour le joueur. "

Creajol : Bonjour, merci de nous accorder ces quelques pensées !



Creajol : Qui es tu ?

Julien Buseyne. J'ai 33 ans, ma vie a été assez chaotique jusqu'à l'âge de 29 ans, moment auquel j'ai mis un premier pied dans le domaine du jeu vidéo. Je suis marié, j'ai une fille, 2 chats et une bibliothèque assez bien fournie en ouvrages que d'aucuns qualifieraient de soporifiques. Je manifeste un intérêt prononcé pour l'histoire des civilisations, l'étude du vivant, l'art du combat armé et les jeux. Tout ça m'a pris assez jeune, entre 7 et 8 ans, et ne m'a jamais lâché depuis.

J'ai sale caractère, peu d'illusions, un respect sans borne pour les gens qui ont le courage de leurs convictions et je suis persuadé que la gravité est le bouclier des sots, et fait le bonheur des imbéciles.

[NdCreajol: Ce portrait fait partie des interviews publiées début 2009 sur le blog d'origine, et par la suite migrées sur le site dédié Creajol. Par conséquent, il s'agit plutôt d'une retrospective !]



Creajol : En quoi consiste ton métier ?

Je suis responsable de la localisation. Mon métier est de m'assurer que les textes produits par mes collègues sont correctement localisés dans toutes les langues dans lesquelles on souhaite produire un jeu. Ça ne se limite pas à de la traduction, mais aussi à de l'adaptation à la culture visée. Je collabore étroitement avec le responsable de la qualité pour mener à bien mon travail. Si quelque chose va de travers, c'est moi qui doit rendre des comptes.



Creajol : Est ce qu'il s'agit d'une passion ?

Le jeu est en effet une passion. Pour l'instant je suis impliqué au niveau de la finition mais j'espère progresser vers la réalisation ou la conception. Après tout, il y a un peu moins de deux ans, je n'en étais qu'à l'exploitation.



Creajol : Professionnellement, quel est ton plus grand souhait ?

Participer à un projet d'une envergure égale aux anciennes productions d'Interplay (un jeu de rôle, bien entendu), comme Fallout 1 et 2, Baldur's Gate ou encore Planescape Torment. Mais les places sont chères.



Creajol : Que dirais-tu aux gens qui rêvent de travailler dans le milieu ?

Remettez les pieds sur terre ou vous serez croqués tout rond. Le jeu vidéo est un milieu de travail épatant, surprenant et enrichissant mais c'est avant tout un lieu de travail (avec des patrons, des contraintes et des objectifs). L'afflux permanent de personnes désireuses de travailler dans ce domaine permet de justifier une politique de bas salaires et des méthodes d'embauche discutables. Soyez préparés, défendez votre steak ! Et si vous n'en êtes encore qu'aux études, prenez bien conscience qu'un diplôme c'est bien mais un diplôme et un ou plusieurs projets personnels menés à bien c'est mieux.



Creajol : Que transmets-tu lorsque tu crées ?

Pour ma part, je m'efforce d'offrir aux joueurs un jeu dans leur langue. Cela peut paraître anodin, mais combien de fois vous êtes-vous retrouvés face à un jeu traduit à l'arrache, ou pire, à moitié traduit ? J'ai toujours estimé qu'un jeu correctement localisé offre plus d'immersion au joueur. On profite toujours mieux d'un jeu lorsqu'on a pas besoin de se demander toutes les 5 minutes ce qu'a voulu dire le traducteur.

En définitive, ce que je transmets c'est ma conviction que les petits détails font les grandes choses et ça se manifeste par un regain de qualité pour le joueur.



Creajol : Faire un jeu vidéo, c'est s'amuser toute la journée ?

Toute la journée, non. Certains tâches sont rébarbatives mais nécessaires. Le reste du temps, oui, je prends plaisir à faire mon travail. Dans l'absolu, quelqu'un qui ne trouve aucun plaisir dans son travail doit remettre en cause ses choix de carrière. C'est cependant plus facile à dire qu'à faire.



Creajol : Est ce que tu as rêvé de faire ce job ?

Non. J'ai rêvé de l'Antarctique, des plaines d'Ukraine, de la forêt amazonienne, du grand large et d'îles lointaines. La réalité m'a rattrappé avec le zèle d'un coureur cycliste fourré aux anabolisants et le choc fut rude. Après 4 ans de galère, j'ai vu une annonce pour devenir gestionnaire de communauté pour un MMO célèbre. Je me suis dit « Pourquoi pas moi ? » et j'ai eu ma place. Rétrospectivement, j'ai encore du mal à y croire.



Creajol : Qu'est ce que tu attends d'un entretien d'embauche avec un candidat ?

Que le candidat ne me sorte pas les fadaises habituelles. Il perd son temps parce que ce n'est pas ce que je recherche. Si je dois travailler avec une personne, je veux savoir qui elle est vraiment ; je ne m'intéresse pas à la façade qu'elle produit pour se vendre. Pour le reste, un entretien reste un échange. J'espère d'un candidat qu'il ne soit pas là uniquement pour répondre à mes questions mais aussi pour en poser. Un dialogue vaut toujours mieux qu'un interrogatoire.



Creajol : Ton jeu préféré, jeu le plus joué ?

Le jeu auquel j'ai le plus joué n'est pas un jeu vidéo. Je joue à Rolemaster depuis 1996, comme joueur et comme maître de jeu.

Mon jeu vidéo favori... question ardue. Je crains de ne pas en avoir... J'ai joué a une grosse quantité de jeux vidéo depuis le milieu des années 80 et certains sont au sommet d'une longue liste mais aucun n'émerge comme étant mon préféré. Je me contenterai de remercier Interplay pour avoir eu le cran de produire pendant des années des jeux de rôle adultes, et CD Projekt pour avoir fait de même récemment avec The Witcher.



Creajol : Ta plus grande joie dans la production d'un jeu ?

Le moment où on a mis tout ce qu'il faut pour que le jeu (ou un morceau du jeu) soit OK et qu'on a encore un peu de temps pour les extras ; plaisanteries, petites animations amusantes, références culturelles, clins d'œil. Bref, la phase où on donne de l'épaisseur ou de la personnalité au produit.

Source : http://www.khronographe.net/

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